Azzurra se regardait dans le miroir. Des yeux cernés, encore des traces, aux pommettes bleuies, de coups reçus ça et là. Elle marmonnait, soupirait. Elle se passa de l'eau sur le visage. La pièce était sombre, mal éclairée. Il s'agissait d'une sorte de studio en souterrain qui appartenait à son gang. Il y avait un matelas sur un sommier sommaire, un frigo dans lequel trainait quelques bières et beaucoup de cannettes de Coca Cola. Pas de nourriture malheureusement, dommage car elle avait faim. Son captif avait faim très certainement.

L'attaque sur le groupe de Gargouilles qui détachait des hommes pour harceler le quartier fut un succès. Ils n'attaqueraient plus avant un certain moment, en tout cas. Lalo y avait partipcipé, la Tégénaire aussi avec ses drones. Azzurra avait porté son masque et les avaient rejoints.

Lalo n'avait pas digéré la mort d'un de ses hommes, comment il s'appelait ? Oui, les milliers de $ de nourriture que Azzurra avait dû ramener et qui ont brûlé avec son compatriote. A cause des gargouilles. Il avait frappé sans discontinuité, menant à la mort de toutes ces Gargouilles pour la plupart. Pas de quartier.

Mais toute cette vendetta sanglante n'était pas le fait d'une Justicière comme Azzurra. La mort, elle la côtoyait jour et nuit. Elles étaient peut-être probablement même devenues très amies. L'Italienne en était dégoutée. Tuer ces Gargouilles pour que d'autres reviennent la semaine prochaine ? Il fallait mettre fin à ce cycle.

Elle avait réussi à en attraper un et à le menotter à une chaise dans cette cave souterraine où personne ne l'entendrait crier. Lui, ou elle, à vrai dire. Elle l'avait mis là, dans une chambre froide qui contenait quelques boîtes de conserve. La chaise était lourde elle-même attachée à un pilier. Dans tous les cas il ne se libérerait pas de ses liens. La Justicière avait demandé de l'aide pour le transporter là, puis du calme pour s'en occuper autant qu'il fallait. Azzurra retira son gilet pare-balles, il était intact.

Son dos lui faisait mal tout entier, ses muscles lui brûlaient. Elle avait retiré son manteau, il ne lui restait plus qu'une chemise. Elle déposa son holster avec son flingue (à but de protection, on ne sait jamais) et ses quelques gadgets. Le gilet était intact. Il n'y avait rien de plus glaçant pour elle que de le retrouver criblé de balles et se dire qu'elle aurait dû mourir. Ses côtes brisées. Des mauvais souvenirs. Il n'y avait plus que le sang, le sang. Après s'être rafraichie, elle alla faire un tour du côté de la chambre froide et observa par le hublot. Il était encore inanimé.

Alors, elle alla se jeter sur le matelas et partit pour une petite sieste. Elle se réveilla ensuite sans trop savoir l'heure qu'il était. Il n'y avait pas de fenêtres. Azzurra ouvrit le frigo, sortit une bouteille d'eau et un Coca Cola et fouilla dans la kitchenette pour trouver des pailles.

Elle retira sa chemise et passa un hoodie noir qui sentait le vieux, elle remit son masque d'or et le capuchon et traversa le couloir menant à la chambre froide. Peut-être cet endroit était un abri anti-atomique ?

La brune s'en fichait. Elle déverrouilla la porte et posa la bouteille d'eau fraîche sur une étagère. Ses lentilles masquaient ses yeux, et son œil droit semblait zoomer et dézoomer sur l'Asiatique démasqué. Son visage lui paraissait étrangement familier, il fallait dire qu'elle en avait vu des Chinois.

Elle voulait des réponses. Et personne n'était là pour la surveiller et lui dire quoi faire. En fait, Maestra s'en fichait de la vie de ce type. Elle ne le tuerait pas, s'il fallait quelqu'un s'en occuperait pour elle. Elle voulait des informations qu'elle n'était pas obligée d'avoir.

Ce détachement faisait pencher la balance en sa faveur et réduisait son stress. Sa voix métallique déformée déchira le silence, tout comme l'interrupteur déchira l'obscurité en irradiant la chambre froide de sa lumière.

D'une voix lasse, mais claire, elle articula quelques mots.

- Chambre froide. 3-6°C si je veux. Personne ne vous entendra crier. Bunker. Je veux savoir ce que vous savez sur le Bossu. Ou le Gant Noir. Si je suis content avec les informations, vous êtes dehors. Que vous êtes morts ou pas morts c'est pareil pour moi. Si je suis pas contente, alors pas par pas vers le décès jusqu'à ce que je suis contente ou que vous êtes mort. Exercice facile.

Elle se dirigea vers l'interrupteur et mit en marche la réfrigération. Vu le volume de la pièce, il faudra de longues heures pour atteindre la température désirée.

- Vos amis tous morts, femmes, les hommes, brûlés avec les pneus. Vous êtes dernier survivant. Dites merci, et répondez aux questions.

Ses yeux, son regard métallique scintillait en direction de son captif.

- Maintenant je suis civile. Vous obéissez dans deux heures vous êtes dehors. Tout le monde est content. Mais si vous faites perdre mon temps, sachez que je suis payée plus pour les heures supplémentaires et donc que j'ai grand plaisir d'être ici longtemps car vous payez mes vacances. Très contente, vous moins content. Alors vous parlez rapidement, et vous serez contente plus que si vous parlez pas rapidement. Capiche ?

Elle jeta un petit signe de tête en direction de la bouteille d'eau, avant d'ouvrir sa canette et y planter une paille et de commencer à boire bruyamment tout en se tenant bêtement devant lui.

Pour le moment, Azzurra était plutôt amusée à faire ça. Ca lui changeait du quotidien. Et elle se sentait maîtresse d'elle-même. De la sitaution.

Et quelques spasmes violents dans sa tête, une visualisation de coups de batte qu'elle pourrait lui donner pour lui faire cracher l'information par le cerveau plutôt que la bouche lui donnait un petit plaisr mesquin anticipé tout particulier.

EPSILON

Miss Falcone ? Azzurra eut un coup de chaud, se figea, se mettant à suer alors que son cœur se mettait inexpliquablement à battre vite. Le type en face avait l'air plus calme que elle et elle vit trouble un moment, lui faisant des remarques sarcastique sur le Coca qu'elle buvait. Coca qui était répétons-le bien frais et désaltérant.

Pire encore, il donnait des informations sans besoin de le menacer.

En fait, il n'avait rien d'hostile. Et ça, c'était énervant. Déjà que ficeler des gens (façon shibari, c'était la seule qu'ellle connaissait mais ça marchait d'accord) sans être payée c'était pas quelque chose qu'elle tolérait facilement mais en plus si on se moquait d'elle ainsi. Comment connaissait-il son nom ?

Un sacré numéro. Azzurra luttait contre l'envie de lui jeter son masque à la gueule et le tabasser, mais. Elle n'y arrivait pas. Elle n'était pas une violente dans l'âme, pas sans qu'on la motive un peu et il ne la motivait pas. Il lui parlait d'une lampe UV. Maintenant il voulait bronzer. Elle resta silencieuse, intriguée mais en même temps agacée. Après avoir longuement réfléchi, elle finit par casser le silence de nouveau et déclarer :

- Si vous avez besoin de la couverture vous criez. Je crois c'est pas l'heure pour penser au bronzage.

Azzurra tourna les talons et sortit avant de refermer la porte derrière elle, et revenir dans la petite chambre où il faisait un peu moins frais. Elle alluma son PC tranquillement et vint contacter la Tégénaire.

Azzurra : Ciao

Mark : https://2img.net/image.noelshack.com/fichiers/2023/26/4/1688061437-b9c47ef70bff06613d397abfce02c6e7.jpg

Azzurra : le type dans ma cave il connaît mon nom

Mark : https://2img.net/image.noelshack.com/fichiers/2023/26/4/1688061465-happy-happy-happy-cat-1.jpg

Azzurra : stp sois sérieux comment le chinois il connaît mon nom

Mark : https://2img.net/image.noelshack.com/fichiers/2023/26/4/1688061546-82daf4-ff1c0ff1c7fa4ae59bff4fae6b167008.jpg

Mark : Tu es sûre c'est pas un des Chinois avec qui tu as combattu plusieurs fois et qui était un espion pour les Gargouilles ?

Azzurra : je sais pas c'est les mêmes et ils sont 6 milliard, pourquoi il veut une lampe UV ?

Mark : https://2img.net/image.noelshack.com/fichiers/2023/26/4/1688061636-92b93d4222bd6ce22e3c706def229551.jpg

Mark : Comment ça une lampe UV

Mark : Tu as-vu j'ai le dernier épisode du Joueur du Grenier en avance https://www.youtube.com/watch?v=HjfrFn5syKg

Mark : Tu as de la chance de comprendre l'Italien tu peux regarder tout de suite avant d'avoir la traduction, moi je dois attendre

Azzurra : il veut que j'apporte une lampe UV

Mark : il y en a dans le local des outils

Azzurra : OK

Azzurra : j'irai après j'essaie de le congeler d'abord

Mark : https://2img.net/image.noelshack.com/fichiers/2023/26/4/1688061437-b9c47ef70bff06613d397abfce02c6e7.jpg

Azzurra s'étira avant de s'allonger sur le lit et retirer son masque. Elle gonfla les joues, et soupira à plusieurs reprises. Tout ceci l'épuisait. En fouillant les étagères elle retrouva un exemplaire de "Ultime lettere di Jacopo Ortis" qu'elle avait acheté une fois mais perdu. Il y avait encore son marque-page dedans. Comment ça aurait pu atterrir là ? C'était surement dans un carton de matériel qui avait atterri ici.

Elle lut plusieurs pages, sur le dos, les bras en l'air, avant de laisser le livre tomber sur son visage et somnoler doucement entre deux bâillent. Finalement, elle se mit deux claques mentales et se remit sur pied. Azzurra se dirigea vers le local, fouilla les cartons, et prit 15 minutes à trouver la lampe UV. Elle passa devant le hublot, vit le Chinois pas encore mort, et l'ouvrit.

Pour le coup, il faisait très froid. Azzurra posa la lampe UV sur une étagère, poussant quelques boîtes de conserve pour laisser la place, voyant derrière ces boîtes des Cup Noodle sous cellophane, achetés par paquet de cinq.

- Oh.

Elle s'en saisit, abandonnant tout ce qu'elle voulait faire, ouvrit le paquet et en tira une. Goût poulet. Pas son préféré, mais bon. Pas que ce soit nourrissant, mais sur le coup ça lui faisait très envie, ça faisait des mois qu'elle n'en avait pas mangé. Et ce n'étais pas expiré. Enfin, c'était sec, c'était pas grave si ça expirait.

- Je reviens.

Elle referma la porte derrière elle et mit une bouilloire à chauffer, avant de verser dans la Cup Noodle, tout en faisant bien attention à ce que la ligne soit pas dépassée. Il y avait des ingénieurs qui avaient travaillé dur pour faire en sorte que le volume exact d'eau soit mis, alors Azzurra faisait de son mieux pour le respecter. Ensuite, elle prit une fourchette, la rinça sous l'eau après avoir fait couler et revint dans la salle glacée, avec son manteau par-dessus le hoodie pour manger sa Cup Noodle. Elle mangea calmement.

- Pas soif ? Pas faim ? Pourquoi la lampe ? Répondez. Vous savez comment trouver Scorpiana ? Ou elle se cache ? Répondez. Et essayez pas de m'amadouer je suis civile, pas votre amie.

Azzurra restait calme, attendant d'avoir une raison de le cogner.

EPSILON

Ces nouilles au poulet étaient très bonnes. Elle fronça les sourcils quand il vint encore faire une remarque sur ce qu'elle mangeait. Elle avait faim. Les gargouilles avaient eu raison de plusieurs des cargaisons de nourriture emmenée dans le quartier dernièrement, et même lorsqu'il y avait à manger, combattre le crime jour et nuit pendant que cet imbroglio désastreux que devenait Gotham lui coupait la faim.

Azzurra cependant se forçait à garder la discipline pour continuer à manger et renforcer son corps, mais force était de constater que ces événements amenuisaient ses forces, son mental, son corps. Parfois elle se demandait encore comment elle se levait chaque matin. Elle se demandait pas si un jour elle n'allait pas craquer et se suicider. Elle n'avait même pas réellement d'amis, juste une gamine harceleuse qui était à ses yeux qu'une sorte de chat attardé qui lui causait plus de soucis qu'autre chose. Et ce type faisait le malin. Alors qu'elle mangeait ses Cup Noodle qui étaient très bonnes, Azzurra sentait quelque chose la prendre aux tripes. La panique.

Une soudaine réalisation qui était à deux doigts de la sortir de l'état de léthargie dans lequel elle baignait depuis cet événement. C'était ça. Elle n'allait PAS bien. C'était juste profondément enfoui en elle. Il se mit à parler. Elle restait silencieuse. Il ne répondait pas aux questions. Il l'énervait. Azzurra écouta calmement.

Elle ignorait son nom.

Elle s'en fichait. Il lui proposait de passer la lampe sur son bras. Mais après avoir fini de manger. Alors, elle mangea. Le bouillon était déjà tiède, elle l'avala d'un coup.

- Je pose des questions mais j'ai pas mémoire d'avoir demandé des commentaires sur ce que je mange.

Azzurra se jeta hors de sa chaise et saisit la lampe UV avant de passer sur son bras et y voir un tatouage invisible. Elle l'observa un moment, évitant de croiser son regard.

- Capisco. D'accord. Vous êtes avec les Asiatiques que j'ai croisé. C'est ce que vous dites. Je vais vous laisser réfléchir un peu pour me répondre : vous faisiez quoi avec les Gargouilles. Et de deux, puisque vous étiez avec eux, il faut que vous me dites ce que vous avez appris.

Azzurra soupira longuement, son regard peinait à se fixer sur un point, quelque chose la perturbait.

- Je vais vous laisser un peu le temps pour réfléchir. Les Gargouilles ont attaqué des cargaisons de nourriture et armes que on faisait venir depuis dehors la ville. Vous étiez avec eux. Je veux les explications convaincantes sur tout. Mieux encore, si vous savez s'il reste des cargaisons volées où elles sont, si vous savez où il y a d'autres Gargouilles, je veux tout savoir. Réfléchissez dans votre tête. Au revoir.

Azzurra retira son manteau et le mit sur les épaules de son captif. Probablement qu'elle eut un peu pitié. Son regard froid se posa sur lui, alors qu'elle frissonnait, et elle fit double-tour en ramassant sa Cup Noodle et en refermant la porte derrière lui. Elle revint sur la chambre et croisa Mindy qui était allongée avec un masque de chat et en tenue trop légère.

- Zzuuzuuu mon bébééé.

Ainsi, elle l'avait retrouvée. Azzurra aurait voulu être seule. Celle-ci lui lança un regard noir. La pauvre avait pris cher elle aussi. Un peu plus calme dans son comportement qu'elle aurait pu imaginer, toujours aussi prolixe en SMS, bien plus cinglée. Mais pourtant, quand Azzurra était là, elle ressentait une certaine mesure dans la façon d'être de Mindy.

Elle avait risqué gros pour la sauver. Mais Mindy était seule à présent, puisque sa famille pensait qu'elle avait été envoyée dans un autre hôpital loin de Gotham. C'est pour ça que Azzurra devait la garder près d'elle. Peu importe son argent, Mindy Jensen était trop bête pour survivre toute seule.

Peut-être Mindy avait-elle eut une once d'intelligence pour rester supportable tant que Azzurra la garderait près d'elle en respectant les distances de sécurité nonobstant. Azzurra prit contact avec la Tégénaire, avant de lancer à Mindy :

- Cache ton visage et va lui donner à boire. J'ai oublié. Habille-toi chaudement.

Mindy se jeta sur ses pieds et se mit en garde à vous.

- CHEF, OUI, CHEF. J'peux prendre le fouet ? Pour qu'il parle ? J'dois m'entraîner si j'veux faire cracher l'amour autant bien qu'toi ma Zzuzzu !

Azzurra tourna la tête avant de joindre trois doigts qu'elle secouait doucement en l'air avec un air peu amusé, en guise de réponse. Ce n'était pas un nom, et Mindy sortit de son sac un martinet avant de revenir dans la chambre froide, pendant qu'Azzurra demandait des renseignements à la Tégénaire sur ce tatouage, les triades, l'identité du Marteau d'Argent et de ses compatriotes.

Equipée d'une grosse doudoune de pionnier du Klondike qui lui donnait une double épaisseur, et de son masque de chat, Mindy faisait claquer son martinet. Mettant ce son à fond sur son téléphone pour mettre l'ambiance, elle s'approcha en faisant tournoyer son fouet : https://www.youtube.com/watch?v=6MZw_Iv0wdU

- Gare à toi, le Chinois ! Sinon tu vas gouter au poing de la justice ! En attendant je dois te donner à boire. Brrr ! Il fait froid ici.

Se saisissant de la bouteille, elle lui donna à boire comme Azzurra avait dit. Elle fut étonnée de voir que Azzurra ne l'avait pas frappé. C'était pour ça qu'elle n'avait pas eu de réponses. Il était temps pour elle de rendre son Azzu chérie fière d'elle. D'un pas de côté, elle retira le manteau sur les épaules de l'Asiatique et vida le reste de la bouteille sur lui pour qu'il ait froid plus vite, bercée par la chanson qui lui donnait des envies de le frapper pour rendre Azzurra fière.

Mindy mit son pied sur un tabouret et s'appuya su son genou, avant de lui décocher un coup de martinet pour le prévenir. Derrière son masque de chat, ses yeux noirs semblaient vides. Sa carrure féline ne payait pas de mine, mais ses mouvements erratiques, bestiaux, laissaient comprendre qu'elle ne serait pas aussi raisonnée que son amie.

- Maintenant tu vas me dire pourquoi tu travaillais pour les Gargouilles.

Son cerveau déconnectait, elle n'avait plus qu'une chose en tête : un besoin insatiable de pouvoir sortir de cette pièce pleine de réponses obtenues en cinq minutes alors que les méthodes lentes et chiantes d'Azzurra prendraient plus de temps. Si Azzurra avait ses réponses grâce à elle, il n'y avait pas de doutes, elle voudrait l'avoir tout le temps à ses côtés et voudra même coucher avec elle. Alors, elle l'ouvrirais en deux s'il le fallait pour obtenir ces réponses.

- Fais pas le malin avec moi, je vois à ta petite gueule de citron que tu te fous de la gueule du monde, et que tu te moques de mon bébé d'amour. Elle m'en voudra pas si je t'ouvres en deux alors on va faire ça vite. Xie Xie !

Mindy se jeta sur ses petites jambes avant de laisser un long frisson d'excitation parcourir le long de sa colonne vertébrale. Elle trottina sur ses jambes et cabriola jusqu'à un coin de la pièce où il restait du matériel de plomberie d'une précédente rénovation et se saisit d'un tuyau d'environ 70 centimètres qu'elle manipula comme une batte de baseball. Toute excitée et en lâchant des petits cris d'excitation, elle swingua dans le vide avant de se planter devant lui.

EPSILON

Voilà qu'il manquait de respect à Mindy. Personne ne manquait de respect à Mindy Jensen comme ça, quand son père saurait, il cramerait tous les restaurants chinois de la ville ! Mince. Pour le coup elle pourrait pas appeler son père, mais Azzurra, et Azzurra était beaucoup plus cruelle quand elle voulait ! Mindy se tendait.

- Tu rigoles ! Azzu est SUPER CHARISMATIQUE ! Les vilains ils ont tous peur d'elle ! Et elle est super intelligente aussi ! C'est grâce à elle qu'il y a eu le scandale du Watergate et qu'ils ont destitué Reagan ! Et toc ! Ca t'en bouche un coin, hein ?... ET PIS ELLE A UNE GRANDE ENVERGURE OUI, tu devrais la voir écarter les bras !

La discrimination envers son Azzu, Mindy n'aimait pas ça. Ca la mettait hors d'elle, très en colère. Elle étira son bras et se mit en position pour striker, et sans sommation lui asséna un grand coup à l'épaule, puis plusieurs, encore, et encore. Elle voulait le transformer en tas de sang informe. Il lui faisait penser à quand elle était en école privée dans les hauts quartiers de Gotham, cet immigrant chinois nommé Yan Liwei, tout petit et tout chétif, il était tombé amoureux d'elle et elle le détestait. Mindy s'amusait à l'humilier et le traiter comme un chien et il obéissait en échange de quoi ? Un peu d'attention ?

Si seulement elle avait eu une batte en le rencontrant. Elle frappa, assez habilement il fallait dire vu qu'elle avait pratiqué tous les sports pendant son enfance car son papa voulait qu'elle soit une fille parfaite, jusqu'à ce que la porte de la chambre froide s'ouvrit.

- Uccello.

Mindy s'arrêta et sourit alors que Azzurra portait sa main à ses cheveux pour se masser lentement la tempe. Azzurra soupira.

- IL VOULAIT PAS PARLER, IL A DIT QUE TU AVAIS DES BRAS COURTS.

Azzurra plissa les yeux.

- Qu'est-ce que je t'ai demandé ?

- Il a dit que tu étais IDIOTE ! Il nous a insultées !

Mindy brandit son tuyau encore, elle aurait voulu lui fendre le crâne en deux mais Azzurra était arrivée trop tôt pour l'en empêcher. Cette dernière ne savait pas trop comment y répondre. Ni s'il fallait s'énerver, ou pas. Avec Mindy c'était compliqué, plus tu t'énervais contre elle, tu pouvais même en venir aux mains, et plus elle devenait insupportable. Elle prenait un plaisir orgasmique à se faire crier dessus, et c'était un spectacle à ne pas montrer à cet homme. Oh, et puis merde.

Azzurra pressa le pas, fonça sur Mindy et lui attrapa la main en lui tordant le poignet pour qu'elle lâche le tuyau, tout en lui faisant comprendre d'une voix forte jusqu'à à ce qu'elle puisse enfin lire la crainte dans les yeux de la gamine.

- Stupida ragazzina. Mi stai prendendo per il culo? Ti ho chiesto di colpirlo? Ti ho chiesto di dargli da bere. Perché non riesci a capire le cose semplici? Pensavi che fossi felice di essere trascinato da una ragazza così stupida? Ora ti nasconderai in un angolo, non voglio vedere la tua stupida faccina. Hai capito? Imbecille. Retourne dans la pièce à vivre et tu attends que je revienne, on va mettre les choses en clair, j'en peux plus de tes conneries. Dopo tutto quello che ho fatto per te, è così che mi ripaghi.

Peut-être un accent sicilien finement travaillé, mais il était évident que dans sa langue maternelle, Azzurra dégageait un autre niveau de prestance. Sa voix, même son intonation avaient changé. Elle lâcha un regard noir à l'Asiatique avant de laisser Mindy s'enfuir. Ca n'allait pas être possible. Si seulement cette gamine pouvait être un tout petit peu moins conne. Juste un tout petit peu. Si elle avait été un tout petit peu moins conne, elle aurait pu la relâcher dans la nature. Mais Azzurra se sentait responsable. Et contre ça, elle ne pouvait rien y faire. Après avoir soupirer, elle s'approcha de la sortie et éteignit la chambre froide. Il faisait un froid de canard, et en plus visiblement Mindy lui avait vidé une bouteille d'eau dessus pour qu'il gèle plus vite.

En quoi une gamine mal éduquée et borderline aux penchants sociopathiques, mais sans aucun charisme pour être utilisé à titre dissuasif, pourraient être utiles à Azzurra ? L'espace d'un instant, cette dernière aurait pensé qu'elle pourrait en faire quelque chose. Maintenant, Mindy lui avait donné une bonne raison de rendre cet Asiatique non hostile, hostile.

Azzurra, laissant la porte ouverte, partit et revint avec une serviette et une trousse de soins. Sans un mot, elle épongea au maximum, d'une main douce, l'Asiatique et lui remit son manteau dessus, avant de s'asseoir sur le tabouret à côté.

- Désolée pour ça. C'est bon, je vois qui vous êtes.

Elle poursuivit d'une voix un peu énervée.

- Mais c'était trop demandé de répondre à mes questions ? Vous jouez à plus malin, vous faites des jugements de valeur alors que j'ai rien demandé, j'ai demandé les réponses. Vous auriez répondu honnêtement aux questions sans faire le clown et ça aurait été réglé. Vous avez bien vu que j'avais pas envie de jouer avec vous, moi j'ai été civile avec vous je voulais pas vous faire du mal. Votre comportement est immature. Non, en fait je suis pas désolée pour ça. Vous méritez.

Elle se décoiffa en se passant la main dans les cheveux.

- Vous êtes plus mauvais que moi à ce jeu. Je vais vous libérer et vous soigner. Après je veux que vous me parliez de vos amis. On n'est pas des ennemis et on a combattus ensemble. On devrait pouvoir s'aider et faire des choses bien un peu plus souvent. Et votre ami marteau de jade est très gentil et très fort même s'il fait un peu peur. Enfin, vous pouvez parler si vous voulez, sinon vous pouvez faire des commentaires sur mes cheveux ou me dire que c'est pas bien mettre du vernis chimique sur mes ongles. Auquel cas je vous en mettrai une avec le plaisir.

Elle ne souriait pas. Elle vint derrière lui et le détacha, en prenant un peu de temps car elle avait fait ça bien.

- Avancez, et tournez à droite. Il fait froid ici. Et je vais vous faire à manger. Il reste encore des Cup Noodle.

Maintenant, sa bouche se tordit. C'était un genre de sourire un peu méchant. Une flamme de vice sur un visage serein.

EPSILON

Il lui prenait sauvagement la tête. Azzurra était une fille patiente. Si elle ne s'énervait pas, c'était souvent par faiblesse. Mais elle était une femme. Mindy le savait bien, elle qui avait déjà vu Azzurra énervée. Une femme ne s'énerve pas pour rien. Elle s'agace. Lorsqu'elle s'énerve, lorsqu'elle en va aux mains, une femme frappe pour tuer. Azzurra ne dérogeait pas à la règle.

Il lui dit qu'elle ne connaissait rien aux relations sociales. Ou qu'elle ne savait pas les gérer. C'était pas faux. Mais le contexte l'empêchait d'être efficace. Elle était très loquace en italien, en anglais, il lui fallait beaucoup réfléchir. Et les Américains étaient rudes et malpolis. La pauvre se sentait parfois comme un simple pantin, une sorte d'animal qui roucoulait des mots dans une langue étrangère, peu importe ce qu'elle disait. Ce qui comptait, c'était la forme.

Là, on lui demandait, le fond et la forme. Lorsqu'elle utilisait sa force latente, son ultra instinct sur quelqu'un qui l'attaquait et qu'au bruit elle savait qu'il allait passer 6 mois à l'hôpital, qu'il ne se remettrait jamais de combien ça lui coûterait et qu'il ne remarcherait plus correctement, même s'il méritait amplement, Azzurra se sentait mal pour lui. Alors une personne qui n'avait rien fait pour mériter ses poings, qui n'avait pas payé pour, elle n'y arrivait pas. Le coup ne partait pas.

Cela dit, d'homme à homme, de Chinois à Italienne comme elle pensait, il parlait déjà davantage. Elle avait toutes les informations qu'elle voulait, et à vrai dire elle était fatiguée et souhaitait dormir. Ces dernières semaines, mais depuis le début de cette crise, la jeune femme n'avait que peu dormi. Parfois il lui arrivait de repartir pour un second métier juste après avoir passé une journée éreintante. Mais il le fallait. Mindy était allongée sur le lit, énervée de l'entendre parler. Elle regardait Azzurra avec dépit.

L'Italienne prit la parole :


- C'est tout ce que je voulais savoir. Je crois que de toute façon je m'en fiche de vos histoires. Vous êtes sur mon chemin, alors je vous aide. Plus loin, pas intéressée. Vos problèmes ne regardent que vous, moi j'en ai déjà assez des problèmes comme ça.

En plissant les yeux, elle fit un geste de tête pour désigner Mindy qui était allongée sur le lit et qui jetait des regards à tout el monde. Elle s'assied d'un bond sur le lit.

- Mettez-vous à l'abri. Je pense que les tables se tournent. Beaucoup de gens rejoignent nos rangs. Moi, je vous aide si vous êtes là, parce que veux juste que les femmes et les enfants vivent en paix. Je vous dois rien. Je sais que vous êtes des gangsters et que vous valez rien.

Civile, comme elle disait.

- La trousse de soins.

Mindy haussa les yeux au ciel et partit avant de revenir, jeter la trousse pour repartir ensuite. Surement aller prendre l'air pour ne pas tabasser le type. Azzurra l'attrapa sans aucun problème grâce à ses réflexes et l'ouvrit avant de s'approcher de lui, la poser sur la table et l'inspecter. Il n'y avait rien de définitif, mais Mindy avait frappé comme une dégénérée. Azzurra attrapa le bras doucement, observa, vérifia qu'il n'avait pas été frappé ailleurs, mais ce petit con s'était bien protégé. Sans silence, avec un professionnalisme assez correct qui montrait qu'elle avait l'habitude d'appliquer ce genre de soins, elle lui pansa le bras, avant de se relever et de s'étirer, et vider le reste de bouillon de sa Cup Noodle dans l'évier. Elle lâcha calmement.

- A moins que vous pouvez m'être encore utile, ou que voulez le Cup Noodle que je vous ai promis, je vous demande de partir. Vous me suivez dehors.

EPSILON

Il avait raison. Il ne valait mieux pas qu'ils sachent qu'il avait été chouchouté et dorloté par Azzurra. Imaginez si ça se savait qu'elle avait des clients qu'elle ne faisait pas payer. Les gens seraient jaloux et essaieraient de la tuer et lui mordre le visage. Il fit part de sa lubie d'interagir chez eux. Azzurra s'en fichait. Elle était là où on lui disait d'être. Mindy se mettait sur le dos, les bras tendus, et lisait un livre qui s'intitulait : "De l'art des listes, vol.2", faisant mine de ne pas s'intéresser à a discussion.

Azzurra s'assied calmement pour écouter ce qu'il avait à dire. Tout cela était pour tout dire très intéressant. Des informations qu'elle ferait remonter à Lalo et à la Tégénaire, à tous ses alliés. Lorsqu'il eut fini de parler, Azzurra finalisa :

- Vous savez qui je suis et où me trouver. Nos chemins se recroiseront.

Azzurra sentait chez lui une frustration à ne pas savoir qui était Mindy. Mindy haussa un sourcil, posa son livre après avoir mis son petit marque-page dessus et se releva d'un bond avant de s'étirer et de mâchonner,

- Tu veux savoir comment je m'appelle ?

Elle se tint droite, fit quelques pas en avant, avançant d'une façon sensuelle pour se trouver à un mètre trente devant lui. Mindy sourit, avant de dire :

- Je vais te dire comment je m'appelle. Je m'appelle Léquasse. Mon prénom, c'est Sam.

Son visage se tordit derrière son masque.

- SAM LÉQUASSE HA HA HA HA

Avant qu'il puisse réagir, Azzurra lui planta une seringue dans l'épaule. Le temps qu'il se retourne et s'affaisse, elle déclara :

- C'est pour la douleur. Avec mes excuses.

Elle amortit sa chute autant qu'elle put avant que Mindy se mette à lui sauter dessus et le rouer de coup de pieds. Azzurra la poussa et dut un peu se battre pour qu'elle le lâche.

- Bah quoi ! Faut qu'il soit un peu tabassé pour que ce soit réaliste !

- Por favor.

Mindy croisa les bras alors que Azzurra soulevait l'homme, lui faisant signe de l'aider à le transporter.

- Por- favor.

- Non, je boude.

- POR- FAVOR.

- Pfff.

- Je te laisse choisir où on le bazarde.

Ceci convainquit Mindy.
Mindy l'aida à le soulever et bien que Azzurra fit 80% du boulot, elles parvinrent à extirper l'Asiatique et le balancer dans la banquette arrière de leur voiture. Azzurra prit le siège conducteur et Mindy passager, toute contente que Azzu la fasse jouer. Après avoir roulé suffisamment loin pour s'éloigner de leur planque, Mindy trouva une magnifique benne à ordures et la pointa du toit sans rien dire, l'air très sérieux, pour que Azzu s'y gare. Fatiguée et désemparée, cette dernière s'arrêta pour le sortir de la banquette arrière et le poser quand même délicatement près des poubelles. Elle s'en voulait, mais c'était pour lui sauver la vie. Azzurra déguerpit bien vite et rejoint sur le siège conducteur, mais Mindy en avait pas fini avec lui et éventra une poubelle avant de péniblement essayer de la lui vider dessus.

Celle-ci craqua sous ses mains et elle s'en mit autant sur elle que sur lui. Mindy hurla avant de courir dans le véhicule.


Les deux complices disparurent dans la nuit.

EPSILON